mardi 11 décembre 2012


Voyage en Dalsland,

contrée de «Vänern le Grand »

 

Texte : J.-M. Brison
Photos : J.-M. Brison, J. Kindt, J. Debrulle, D. Dykmans

Parce qu’il renferme nombre des paysages que l’on rencontre à travers la Suède, le Dalsland est communément appelé « la Suède en miniature »





 

. Cette province située à l’ouest de la Suède est délimitée par le Värmland au nord, la Norvège à l’ouest, le Västergötland au sud et, enfin, le lac Vänern à l’est.
 

 
 Le lac Vänern… Lorsque l’on observe la carte de la Suède, notre attention de pêcheur est immédiatement captivée par cette véritable mer intérieure.
 Toutefois, s’attaquer à un plan d’eau d’une telle ampleur relève d’un sacré défi et peut-être aussi d’un soupçon d’insouciance.
En effet, si le succès d’une sortie de pêche dépend d’une bonne préparation logistique, il dépend également des conditions météorologiques du moment, particulièrement sur un lac de cette envergure.
 La première est maîtrisable, pas les secondes, ce qui met tout pêcheur à la merci d’une déconvenue et ce, même si l’on effectue un périple de 1.500 km en terre suédoise afin de se rendre dans des eaux poissonneuses.


 
Mes amis Johnny, Daniel, Jacques et moi-même avons décidé de tenter l’aventure en ce mois de septembre 2012, période réputée favorable pour la traque des gros brochets.
 Il faut dire que Jacques avait joué à « l’éclaireur » en se rendant dans cette partie de la Suède fin mai dernier, avec une session de pêche fructueuse agrémentée de jolis scores atteignant les 30 spécimens par jour.
 Toutefois, il lui restait un goût de trop peu : la taille des brochets capturés en cette période printanière était trop faible à son goût. 
Et puis, il ne s’était pas rendu sur le fameux lac Vänern, célèbre pour ses brochets dépassant le mètre…
Après une vingtaine d’heures de route, Johnny et moi arrivons à destination, le
moral gonflé à bloc. Nous devons rejoindre Jacques et Daniel, partis 3 jours plus tôt. A quelques centaines de mètres de notre lieu de villégiature, nous longeons un joli lac lorsque nous apercevons nos deux acolytes en action de pêche.



 Nous arrêtons immédiatement notre véhicule afin de les saluer chaleureusement.
 Après la joie des retrouvailles, l’annonce de leurs résultats des deux premiers jours nous glace et place notre moral au plus bas : les prises furent médiocres malgré leur pugnacité et leur persévérance.
A leur décharge, les conditions météorologiques du premier jour étaient exécrables : grand vent et pluie abondante.
Par contre, celles de cette seconde journée étaient diamétralement opposées : grand soleil et vent plutôt faible.
Il fallait donc se rendre à l’évidence : les brochets n’étaient pas très actifs.
 Il faut également préciser que les températures avaient chuté d’une dizaine de degrés par rapport à la semaine précédente, ce qui n’est généralement pas favorable à un regain d’activité chez les carnassiers et les brochets en particulier.
Quelques peu « refroidis », nous reprenons la route pour quelques centaines de mètres afin de rejoindre le lodge bordant ce même lac où nous attendait Johan Postmas, un sympathique ressortissant néerlandais expatrié au pays des élans.

 

 

  

 

 
 
 
Au vu des maigres résultats de nos compagnons, un fameux débriefing s’annonçait après le repas du soir.
Aussi, nous devions nous enquérir de la météo annoncée pour les jours à venir.
A notre grande déception, elle s’annonçait assez rude et très capricieuse.
 Mais, comme l’on dit, « nous y étions » et n’avions donc pas le choix : il fallait tout tenter pour tirer notre épingle du jeu malgré tout.
Etant donné les grands vents annoncés, la pêche sur le lac Vänern se voyait quelque peu hypothéquée.
 Heureusement, ce ne sont pas les lacs qui manquent en Dalsland.
 Ainsi, à quelques pas de notre chambre, nous disposions d'un beau lac, réputé pour ses prises régulières de brochets dépassante allègrement les 110 cm.
 Malgré la réputation de ce dernier, nous planifions de pratiquer un lac encore plus petit afin de nous mettre quelque peu en confiance.
 En mai dernier, Jacques y avait enregistré d’excellents résultats.
 La première journée sur ce petit lac fut l’occasion de cibler plus aisément le comportement et l’activité des brochets.
Pour maximiser nos chances, nous avons décidé de pratiquer des techniques différentes : Daniel et Jacques ont ciblé les gros spécimens avec une pêche à la dérive au vif et à la traîne, à une quinzaine de mètres de profondeur, alors que Johnny et moi avons visé les sujets plus actifs dans les anses bordées de joncs, au jerk et au leurre souple en linéaire.
Le principal problème auquel nous  avons été confrontés consistait à localiser la profondeur où évoluaient les brochets actifs.
En effet, les prises pouvaient survenir dans 1 m de profondeur comme dans 15 m. Tout en affichant une activité minime, les brochets étaient donc très dispersés.
Cette première journée se soldera par de maigres prises de poissons mesurant entre 65 et 90 cm, capturés ici et là, principalement à la traîne.




 
Le lendemain, la météo nous privait une fois de plus du lac Vänern.
Mais les prévisions de la fin de semaine étaient encourageantes.
Il nous fallait donc être patients !
Cette fois, plus d’hésitation possible : nous décidons de tenter notre chance sur le lac situé au pied de notre logement.
Il a la réputation de ne pas être un lac facile mais il génère régulièrement des poissons trophée.
La traîne ayant été prépondérante la veille, nous démarrons avec cette technique, en utilisant des leurres durs évoluant entre 4 et 6 m.
 Au gré de notre navigation, nous arrivons rapidement sur une zone de 30 m de profondeur.
 Sur notre sondeur, nous remarquons d’impressionnantes boules de poissons fourrage non loin desquelles sont positionnés de gros échos en suspension situés principalement sous la barre des 10 m.
Bien que nos leurres évoluaient dans une couche d’eau supérieure, il ne nous fallut pas attendre longtemps pour enregistrer la première touche et une première capture encourageante atteignant les 90 cm.


 
 Daniel et Jacques insistaient encore une fois à la dérive, au vif et en montage fire ball, ciblant ainsi les gros spécimens.
Alors que, pour notre part, nous avions déjà enregistré 4 prises en moins d’une heure, mon téléphone mobile retentit et j’ai la joie de lire un sms me signalant la prise du premier « métré » de la session, un poisson de 102 cm mis au sec par Jacques en montage fire ball esché d’un gardon de plus de 15 cm.


 
Il n’y a pas à dire, ça fait plaisir !
Malgré cette annonce, nous continuons notre parcours à la traîne mais sans enregistrer la moindre touche, hormis une jolie perche de 45 cm venue s’égarer sur le leurre de la ligne de Johnny, un leurre destiné au muskie… ;
Les boules de poissons étaient vraisemblablement constituées également de bancs de perches, proies de prédilection pour les gros becs…


 

 
 
Chemin faisant, nous arrivons au bout de la partie sud du lac et c’est le moment que je choisis pour tenter ma chance en casting, avec un swimbait de type souple à rattle (billes bruiteuses), espérant ainsi dénicher un « pike »
posté sur ce plateau profond de 7 m. Au deuxième lancer, j’enregistre une « frappe d’enfer » et signale à mon compagnon que, cette fois, c’est du « lourd ».
Ce brochet tient le fond et ne semble pas vouloir contempler la lumière du jour aussi docilement que ses congénères plus juvéniles.
Il fournit de nombreux rushs relativement appuyés et, sans même l’avoir aperçu, je comprends que je tiens sans doute au bout de ma ligne ce qui pourrait être mon record personnel.
 Après plusieurs minutes de combat, ce magnifique « métré » à la robe sombre capitule et le verdict du mètre ruban tombe : 116 cm de pur bonheur !

 
 
 

 

 

 
 « Yes », record personnel battu de 8 cm !

 Après ces émotions et une petite séance de photos suivie d’une remise à l’eau dans les règles, nous continuons notre prospection à la traîne mais sans connaître un résultat probant.


 
Nous croisons l’autre embarcation ; ses occupants nous apprennent qu’ils n’ont pas fait mieux. Une nouvelle période d’inactivité semble se confirmer en ce début d’après-midi


 
Même si, en théorie, la saison ne s’y prête pas trop, nous décidons de tenter notre chance au jerkbait le long des roselières, afin de débusquer d’éventuels brochets actifs sur ce poste de chasse typique.
Bien évidemment, nous avons recherché des roselières disposant en façade d’une zone relativement profonde, de 3 à 5 mètres minimum.
 Cela ne valait pas la peine de tenter les autres roselières situées sur des hauts fonds ; elles étaient vides de toute vie piscicole digne d’intérêt.
 Nous avons débuté la prospection de ces roselières aux environs de 15 h et, dès le 3ème lancer, nous enregistrons une première prise sur un jerkbait de 20 cm.
Nous comptabiliserons une dizaine de touches pour 7 prises durant les
deux heures dédiées à ce type de poste, avec plusieurs doublés sans doute provoqués par l’effet de la concurrence alimentaire.


 
 Visiblement actifs, les brochets n’hésitaient pas à se jeter sur des leurres imposants qui constituent à leur yeux une proie de premier choix.
Nous étions satisfaits car il nous semblait que nous commencions à comprendre le comportement des habitants aux dents acérées de ce lac : sans doute les brochets se tenaient-ils plutôt dans les eaux profondes durant la journée pour ensuite venir assouvir leur appétit sur les postes de chasse en fin d’après-midi.
Au cours de notre troisième journée de pêche, Johnny me parut tout à coup bien songeur !
Alors qu’il examinait l’écran du sondeur, lequel affichait trente mètres de fond et montrait la présence de jolies boules de poissons fourrage…
Quelque chose lui trottait à coup sûr dans la tête !
 Pour m’en assurer, je lui crie de couper le moteur et lui demande s’il veut y pêcher.
Sans hésitation, il me rétorque qu’il va attaquer cette zone à la verticale avec des gros leurres souples bien plombés.
Il se plonge dans ses boîtes, sort une tête plombée de 50 g et la garnit d’un gros leurre de 20 cm de type « Sandra » complété par un triple voleur de taille 2/0.
Après une dizaine de minutes à peine, Johnny enregistre une touche lourde à laquelle il répond par un ferrage appuyé. Sa canne plie sur un joli spécimen qui vient d’attaquer son leurre par 30 mètres de fond !
Johnny travaille ce poisson avec précaution. Il s’agit d’un joli brochet de 97 cm qui a goulûment engamé la monture.
 


 C’est toujours une énorme satisfaction pour un pêcheur de tenter une technique audacieuse et de constater qu’elle porte ses fruits.
 Une chose était certaine : il y avait du « pike » à faire dans les abysses du lac !
Cette pêche dans les grands fonds s’avèrera payante dans les jours qui suivront et chaque prise réalisée à de telles profondeurs nous paraissait presque irréelle : on n’a pas souvent l’occasion de toucher des brochets à la verticale si profondément…


 
Les jours se sont suivis de la même manière, c’est-à-dire avec plus ou moins de succès selon les techniques mises en oeuvre.
 Les résultats étaient donc au rendez-vous mais au fond de nous subsistait un goût de trop peu.


 
En effet, quand allions-nous enfin pouvoir défier ce fameux lac Vänern ? Les conditions météo allaient-elles enfin nous le permettre ?
C’est qu’on ne badine pas avec ce genre de détail lorsque l’on veut s’aventurer sur le lac Vänern où se déplacer en bateau s’apparente à de la navigation en mer.


 
Nous sommes mercredi soir et il nous reste deux jours de pêche. Fébrilement, nous examinons les sites météo sur le web.
Tous prévoient deux journées plus ensoleillées et, surtout, moins venteuses.
 Que demander de plus ?
A l’unanimité, nous étions en route pour le Vänern !
Pour le premier jour sur le Vänern, nous avons choisi la région d’Amäl.
 Cette zone du lac riche en rochers ressemble à s’y méprendre à la mer Baltique : imprudents s’abstenir !



La vue est splendide, le soleil est au rendez-vouset l’eau est cristalline.
 Reste à dénicher les brochets de ce lac majestueux…
Après une mise à l’eau dans le port et quelques minutes de navigation, nous prenons la mesure du lac.


 
Bien que fréquentant régulièrement les grands lacs du sud des Pays-Bas, nous sommes tous les quatre impressionnés par cette immensité liquide.
« Par où va-t-on commencer ? » voilà une question que nous ne nous étions plus posée depuis bien longtemps et qui a surgi dans l’esprit de chacun de nous.
 En effet, des centaines de postes s’offrent à nous et, qui plus est, les brochets se pêchent aussi en pleine eau à cette période de l’année…
 Pour l’anecdote, le lac Vänern, c’est 5.648 km² où évoluent brochets, sandres, perches, saumons, corégones et truites Fario, pour ne citer que ces espèces…
Johnny et moi décidons de commencer notre pêche au jerkbait dans les criques rocheuses, un choix qui va s’avérer assez productif, avec un joli triplé réalisé en moins de 20 minutes dans une crique assez étroite, enserrée entre deux parois rocheuses offrant à leur pied une profondeur de 3 mètres.
 Les brochets s’y trouvaient à l’affût, collés à la roche.
Les lancers devaient être très précis et, surtout, il fallait faire preuve de patience en laissant le jerkbait descendre librement avant toute animation.
Une fois le leurre à proximité du fond, deux ou trois coups de scion déclenchaient immédiatement une attaque violente.
 



Toujours dans un souci de complémentarité des techniques employées, Jacques et Daniel ont opté pour la traîne.
 Ils explorent la première cassure située à 15 mètres, en faisant évoluer leurs leurres entre deux eaux.
 Ils obtiendront ainsi d’excellents résultats, avec la capture de quelques jolis spécimens atteignant la mesure plus que respectable des 90 cm.


 



Autrement dit, notre première matinée sur le fameux lac Vänern ne s’est pas trop mal déroulée. L’après-midi sera quelque peu perturbée par un vent qui s’était renforcé, nous empêchant de prospecter à notre guise les rochers situés en pleine eau.


 

 

 
 

 Nous avons donc été contraints de nous rabattre dans les archipels proches du port de la mise à l’eau…

 
Là, ce fut un peu comme la traversée du désert jusqu’au moment où nous avons décidé de pratiquer la 3ème technique qui s’était avérée payante les jours précédents : la verticale en grande profondeur, en l’occurrence par 20 mètres de fond.
 Nous parviendrons de la sorte à capturer quelques poissons supplémentaires, principalement au leurre mais aussi en fire ball, dont un très joli 90+ très combatif pour Daniel, un joli poisson qui a succombé à un leurre articulé de type Jigging pesant pas moins de 93 g.
 

 

Assez satisfaits de notre première expérience tant attendue sur le Vänern, nous misions beaucoup sur notre dernier jour de session sur les eaux scandinaves…
Nous étions bien déterminés à défier à nouveau ce lac mais en nous décalant quelque peu vers le sud afin de découvrir la région , encore un peu plus riche en archipels rocheux.
Hélas pour nous, une fois de plus, la météo allait nous jouer un vilain tour ; elle s’annonçait pluvieuse et modérément venteuse… Mais, il en fallait plus pour nous décourager et nous étions bien déterminés à nous adapter à ces éphémérides rébarbatives.
Après deux ou trois heures de prospection toutes techniques confondues, nous devions nous rendre à l’évidence : l’activité des brochets rencontrée la veille n’était plus que l’ombre d’elle-même.
Seuls Jacques et Daniel sont parvenus à limiter la casse en capturant à la traîne une poignée de sujets de taille modeste. Il n’y avait plus qu’à suivre le mouvement...


 

 
D’heure en heure, nous avons donc tous les quatre insisté avec cette technique, en espérant glaner ici et là l’un ou l’autre brochet en activité. En fin d’après-midi, le vent s’est renforcé et nous a contraints à nous replier dans des zones plus protégées, au milieu de petites îles rocailleuses baignant dans 5 à 7 mètres d’eau.
 Parfois les éléments peuvent s’avérer être nos alliés car c’est lors de ce repli en zone plus calme que nous allons renouer avec les prises, avec une mention
spéciale pour Jacques qui mettra au sec une « poutre » de 111 cm … C’est ce que l’on appelle clôturer une session en toute beauté !



 
Je me garderai bien de prétendre que nous avons compris ce qu’est la pêche du brochet sur le lac Vänern.
 En effet, en raison d’un vent trop fort, nous n’avons exploré qu’une infime partie de ce lac immense et ce durant deux petits jours seulement.
D’ailleurs, heureusement  pour nous, de nombreux lacs sont présents dans le voisinage du Vänern et nous ont permis de mettre à profit la première partie de notre séjour en Dalsland.



 Néanmoins, j’estime que nous avons tiré notre épingle du jeu et ce grâce à notre capacité d’adaptation et à notre polyvalence. Mais vous l’aurez compris, nous rêvons tous les quatre de nous rendre à nouveau sur le plus grand lac de Suède.
 Alors, si je puis m’exprimer ainsi : lac Vänern, votre majesté, à très bientôt pour un nouveau défi !

 

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